Édition – Juillet/août 2006
Mon ami Jean me raconte son dernier massage o ù il a souffert en silence, se promettant de le souligner à la masseuse, un de ces jours. – Non mais c’est vrai ! Pourquoi visse-t-elle dans mes tensions cette mascotte de Sibérie? C’est qu’elle me gonfle plutôt le système. Elle ne fait pas la différence entre pétrir et pétrifier ! Enfin ! Elle pense peut-être que je suis une poupée russe et qu’il faut masser la plus petite en même temps que la plus grosse ! Mais toi Pierre, est-ce que tu tortures tes clients comme ça ?
Non moi j’utilise la nitroglycérine, c’est plus raffiné. – Hein ! Que veux-tu dire ? – Et bien, j’astique la cuirasse avec des gants de cote de mailles et lorsque je décèle une lézarde, j’injecte de la nitroglycérine et je place minutieusement le détonateur entre les dents du client. La pression de la mâchoire fait tout le travail et l’explosion pulvérise toutes les douleurs. -Non mais, je suis sérieux moi, ton travail, c’est de détendre quelqu’un, pas de faire un raid sur les raideurs !
Poêle à bois
C’est que je le connais, moi, le Jean. Il dit n’avoir aucun problème, aucune faiblesse, aucune défaillance, aucun besoin, mais quand même, il aimerait bien calmer ses tensions internes qui s’échauffent à combustion lente. Il me fait penser à Michel, vous vous rappelez “monsieur sport extrême”, le gars qui était prêt à sauter dans le vide pour fuir son stress. Ça m’a pris trois séances pour amadouer ces muscles blindés. C’est que j’en masse pas mal, de poêles à bois. Difficile vous allez me dire, mais c’est encore plus dur quand il est allumé. Alors, pas question de me calciner les mains. Mes doigts ont l’air des fourmis qui patinent sur une enclume brûlante. C’est justement, du bout des doigts, avec délicatesse, que je désamorce l’engin. Et ce n’est pas de l’huile de nitro, mais bien une huile essentielle qui complète le travail.
Nitro ACHARNÉ, nitro café
Toujours est-il que quand un masseur vous demande, comment vous allez, il ne s’agit pas de la formule de politesse habituelle pour entretenir la conversation. Dites ce que vous ressentez, pour permettre d’orienter un dialogue pragmatique. Ce ne sont, après tout, que des indices qui orienteront le travail et définiront les endroits à masser. Un massage ne doit pas faire mal, il gagne toujours à être savoureux. Quelquefois les blocages sont tellement gros, qu’ils font dérailler une longue chaîne d’engrenages de notre savante mécanique. Ça fait déjà probablement longtemps que le torréfacteur vous a brûlé quelques neurones, voilà que c’est le cafouillis dans le percolateur. La pression est parfois tellement intense que le “poêle à bois” est une métaphaible. Des mains espresso ou trop instantanées ne doivent pas broyer les résidus comme dans un moulin. Un habile modelage permettra de replacer les roues pour permettre de moudre avec délectation cette énergie fine et corsée qui vous ravivera. Les mains doivent aussi sélectionner le bon grain. Le toucher, par sa simple énergie, rejoint les plus subtiles tensions sans pressions excessives. Après tout, les connaisseurs le prennent nature ou allongé. Et quand ces gorgées de sensations se manifestent, il faut laisser les frémissements et les effluves du plaisir des sens, s’évaporer jusqu’à votre esprit.
J’ai rencontré Jean, samedi, au marché. – Comment ça va, lui dis-je ? -Ouf ! toute une question !!!
Auteur :
Pierre Buron
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